Bonjour bonjour,

Je suis contente de venir te parler ici de ce qui m’anime comme tu le sais je pense, et c’est essentiellement la « famille » nos enfants pour l’essentiel, mais aussi le couple j’en ai parlé à plusieurs reprises par ici, notre vie de couple avec les séparations je l’ai évoquée aussi mais pas tant que ça, je sais pour les jeunes couples ça peut être effrayant, pour les jeunes parents aussi alors si je peux aider à mon petit niveau j’en serai ravie je crois.

J’ai posté il y a plusieurs mois un petit article au sujet de cette mission de début 2021 et à quel point cette fois je l’ai préparée, si tu l’as loupé je t’invite à cliquer ici pour le lire . Préparer une mission avec des mignonneries et rester solide durant cette « longue » séparation c’est assez différent quand même. Je vais replacer un peu les choses, je suis assez solitaire et indépendante de base. Au moment où j’écris ces lignes il est rentré il y a un mois à la maison, un mois c’est court et c’est long aussi et je suis contente qu’il soit là, avec nous presque tous les soirs. Aujourd’hui je sais que c’était la dernière mission, au moins avant longtemps, l’avenir nous dira plus concrètement ce qu’il en sera…

Alors, comment on fait pour survivre à ces temps, longs, intenses, avec assez peu de nouvelles, et rester amoureux ? Je rappelle que mon mari est en sous-marin, il est en sous-marin nucléaire d’attaque (SNA) donc pas de téléphone appels ou sms sous l’eau, nous pouvons échanger par mail via un bureau spécifique de l’escadrille qui se charge de les lire et les envoyer à bord, arrivés à bord ils sont lus par le commandant en second avant de parvenir enfin à nos marins. Enfin, sur ce type de sous-marins il y a quelques escales en cours de mission en France ou à l’étranger.

C’est tout le reste de l’année que nous préparons les longues séparations, on attend pas d’être la semaine avant le départ pour faire des choses ensembles, passer du temps ensembles. On se dit qu’on s’aime chaque jour de notre vie ! Et je crois bien que ce sont là les fondations de notre vie de couple. Avant le départ nous essayons de passer du temps à deux, je dis essayer car avant le départ il a un rythme intense de travail et de services.
Pour nous l’essentiel a toujours été, ou presque, la communication ! Chaque jour nous écrivons dans notre « journal de bord » chacun de notre côté afin d’y rapporter ce qui se passe dans nos vies, c’est un vrai conseil que nous donnons aux couples plus jeunes que nous ou pas car il est important qu’il puisse suivre mon quotidien, mes coups de mou, de fatigue ou au contraire de joie. A la naissance de notre petit cinquième je lui ai écrit seulement quelques lignes pour le prévenir et le lendemain j’ai pu lui écrire ma joie intense, forte afin qu’il puisse la ressentir. Pendant cette mission j’ai pu lui exprimer ma fatigue et ma lassitude face aux bêtises des enfants, ça évite les ressentiments. Oui car même lorsqu’il est en escale je ne raconte pas toujours tout pour le préserver, mais je dois préserver les enfants aussi de ce qui me touche, ma fatigue, mes coups de mou… Enfin de compte, Maman s’occupe de tout le monde mais personne ne s’occupe de maman.
Je vais être honnête, cette mission a été la plus difficile pour moi tant tout m’a semblé lourd et pourtant je n’avais jamais été si bien entourée. Si je n’avais pas écrit chaque jour toutes mes émotions j’aurai gardé pas mal de rancœur je crois.

Durant cette mission, mon mari a pu parler aussi à ses collègues et c’est touchant de voir que les hommes entre eux sont plein d’empathie, de bonnes intentions et d’idées quand ils découvrent au détour d’une conversation que chez les autres tout n’est pas rose. Quand ils découvrent et veulent aider à la communication… Mon mari a parlé des carnets Save Your Love Date dont j’ai rédigé un article complet. Il m’a écrit une lettre qu’il a posté durant l’escale et y a ajouté une photo de lui, dans le sous marin, qui depuis trône même sans cadre sur ma table de chevet. Et bien entendu il a rédigé son journal en parallèle dont il a pu posté une partie en escale, j’ai découvert le reste à son retour.

Il lui est arrivé de me faire livrer des fleurs alors qu’il n’avait que quelques minutes de réseau au milieu de la Méditerranée. Un soir durant une escale il m’a commandé et fait livrer des sushis. Pour son retour je lui prépare le repas qu’il souhaite le plus manger, et je commande le dessert qu’il aime vraiment, souvent puisque c’est la bonne période, un fraisier. On essaie de se faire plaisir l’un l’autre à travers de petites attentions simples mais marquantes.

La communication et l’envie de se comprendre sont les fers de lance pour supporter une vie un peu atypique. Si on ne parle pas ça va coincer, et je veux dire parler en vérité. Il ne faut pas avoir peur de parler de ses peurs évidemment, mais aussi de ses attentes, ses envies profondes. Vouloir respecter l’autre et donc essayer de le comprendre même si c’est difficile. Chez nous, on joue la carte de la transparence, je préfère qu’il sache si je reçois des amis, un copain seul à la maison, pas de doute. Il a confiance en moi parce qu’il sait que je lui dis tout, ou presque, je n’ai rien à lui cacher. Puis bon, je n’ai pas le temps d’avoir des choses à lui cacher non plus faut bien reconnaître.

Pour survivre à cette absence, ces absences il faut de l’amour, s’aimer extrêmement fort afin que la distance physique ne ternisse pas notre vie. Il y a des couples qui disent s’aimer si fort qu’ils ne peuvent pas être séparés plus de quelques jours. Et il y a les familles de militaires qui s’aiment si fort qu’ils peuvent être séparés durant des mois. Nous faisons partis de ceux-là.